Sunday, February 5, 2017

Lettre ouverte à l’Ambassadeur des Etats-Unis en Haïti



Montréal,  4 février 2017

 

L’Honorable Peter F. Mulrean

En ses bureaux à Port-au-Prince (Haïti)

 

Tabarre 41

Route de Tabarre

P. O. Box 1634

Port-au-Prince

Haïti


Cher Monsieur l’Ambassadeur,
Par la présente, je fais appel à votre sollicitude pour la correction d’une situation infamante résultant d’une décision administrative de votre ministère de tutelle, en l’occurrence le Département d’État. Cette malencontreuse décision, dans la présente conjoncture, porte un grave préjudice à la République d’Haïti.
En effet, depuis l’investiture du nouvel occupant de la Maison Blanche, et sous la pluie des décrets qui tombent en trombe, menaçant l’ordre antérieurement établi, les Haïtiens paniquent et prennent d’assaut vos bureaux à Port-au-Prince aux fins d’obtenir un visa d’entrée aux Etats-Unis avant que l’échafaud ne vienne couper court à leurs rêves d’émigration. Il en résulte, comme il a été rapporté dans les médias sociaux, que l’Ambassade de Port-au-Prince reçoit 1000 demandes de visas d’entrée  aux  Etats-Unis par jour, à raison de 200,00$ US par application.

Par un simple calcul, on peut deviner le trou béant que provoque cette ponction quotidienne dans l’économie de ce pays exsangue.
 
Pour votre bureau : (200,00 $US x 1000) = 200 000,00 $ x 5 jours = 1 million de dollars par semaine ou 52 millions de dollars US en une année.
 
Pour Haïti : 1,00$ US = 67 gourdes. Donc 52 millions de dollars US par année représentent : 3, 484 milliards de gourdes  pour 2017 seulement.
 
Ce sont des chiffres à donner le tournis pour un minuscule pays déjà aux abois. Et la dernière goutte qui transperce les cœurs fragilisés : il n’y a que 5% des demandes qui seront accordées, soit 50 visas par jour. Et le carrousel tourne et retourne pour les perdants qui doivent revenir le lendemain, avec 200 nouveaux dollars US, tenter une deuxième chance, si ce n’est parfois, une dixième.
 
Monsieur l’Ambassadeur, loin de moi l’idée de mettre en doute la décision administrative du Département d’État. En terme de gestion, le bureau doit faire ses frais. Je vous l’accorde. Au niveau socio-économique, face à cette populace, c’est une « barrière à l’entrée », une forme structurée d’auto-contrôle. Je le comprends encore, sauf que…
 
Pour Haïti, je fais appel à votre grandeur d’âme, à votre magnanimité pour un examen exhaustif de la situation. Les Américains sont les amis d’Haïti. C’est écrit. Je n’en disconviens pas. Mais ceux qui promulguent les lois et appliquent les directives ne connaissent rien de ce pays. Tandis que vous, vous y vivez. Les yeux fermés, vous pouvez sans ambages, l’espace d’un cillement, décrire sa vulnérabilité, son état  de déliquescence.
 
Par conséquent, au delà de toute considération de rentabilité, je vous invite à user de votre pouvoir discrétionnaire pour conserver ces sommes en Haïti et les utiliser à bon escient, soit en donnant à manger à ceux qui ont terriblement faim, soit en apportant un peu de soins aux malades qui crient à l’aide etc… Le monde vous en saura gré.
 
Tout en demeurant persuadé que ma requête ne restera pas lettre morte, je vous prie, monsieur l’Ambassadeur, d’agréer mes salutations les meilleures.  

 

Max Dorismond

Montréal, Qc. Canada



C/C : Mr. Kenneth H. Merten

Secrétaire Adjoint Principal

Intérimaire au Département d’État et

Coordonnateur Spécial pour Haïti

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