TRIBUNE DE LIBRE OPINION - EDITORIAl
Jovenel visite les commissariats - ( Photo le Nouvelliste)
Demain le
17 octobre, jour de l'anniversaire de l'assassinat de l'empereur Dessalines
semble aussi un jour qui va être une grande confrontation entre le
gouvernement d'Haiti et une gigantesque manifestation populaire. Cette
manifestation va se faire comme une protestation au refus du
président Jovenel Moise de poursuivre en justice les présumés du vol concernant
PetroCaribe. Cette affaire PetroCaribe semble être aujourd'hui l'aboutissement
du départ d'un régime malsain, incompétent de continuité. Le climat de malaise
que connait le pays depuis les grandes révélations de cette affaire
de vol et la volonté inébranlable du président de protéger ses amis
politiques créent l'une des crises politiques la plus importante que le pays
ait jamais connue. Il y a d'un coté l'énormité d'un scandale de vol gigantesque
que tout le monde reprouve et de l'autre une volonté sans faille d'un
président qui résiste dans un ultime effort de ne pas lâcher ses amis. Et
le pays vit pendant ce temps dans un climat explosif permanent où
tout est paralysé, en d'autres termes un pays bloqué. Pourtant, le
président a la solution en main et a aussi le devoir de ne pas laisser la
situation envenimée. Mais, il veut jouer au matador en s'appuyant sur une
clique de corrompus, tout en ignorant vertement les appels bien fondés
d'une population aux abois privés de tout. C'est qu'il oublie que les grandes
qualités d'un président, c'est d'être à l'écoute de son peuple et non à celle
d'une clique d'assassins du peuple.
Ce qu'on
veut souhaiter, cependant, c'est une manifestation sans violence où les
manifestants vont exprimer clairement et fermement leurs griefs et leurs
ressentiments. Malheur, toutefois, s'il y a provocations la faisant
dégénérer en violences regrettables. Le président devra répondre par devant la
nation et par devant l'histoire d'avoir failli à ses responsabilités sur une
question de droit et de justice.
JM
Port-au-Prince sur le qui-vive, Jovenel Moïse visite les commissariats
Des magasins
de la place se fortifient, des ambassades étrangères lancent des alertes à
leurs ressortissants, les gens se bousculent dans les supermarchés pour
s’approvisionner, des appels à manifestation pour le 17 octobre fusent de
toutes parts… Port-au-Prince est sur le qui-vive. Le spectre de la violence
hante les esprits et les séquelles des émeutes des 6 et 7 juillet sont encore
visibles. Pour prendre le contrôle de la situation, le président de la
République visite les commissariats de la capitale sans se faire accompagner du
directeur général de la police Michel-Ange Gédéon ni des ministres en charge du
secteur sécuritaire.
Les gens ont
peur. Dans les supermarchés à Port-au-Prince, ils se bousculent pour
s’approvisionner en produits de première nécessité. Victime d’un déficit de
confiance, le gouvernement ne rassure pas. Le gouvernement ne peut pas rassurer.
Les messages qui circulent sur les réseaux sociaux alimentent l'angoisse.
Depuis les émeutes des 6 et 7 juillet, les commerçants de la capitale ont
compris qu’ils devaient s’occuper eux-mêmes de leur sécurité. Pour ce faire,
ils se barricadent derrière des murs de plus de trois mètres de hauteur.
À l’approche
des manifestations prévues le mercredi 17 octobre, des institutions
internationales et des ambassades étrangères en Haïti lancent des alertes à
leurs fonctionnaires et à leurs ressortissants.
Parmi les
messages envoyés, on peut lire des mises en garde comme : « Il est conseillé
aux membres du personnel de rester chez eux le 17 octobre, car les membres de
la police s'occuperont de sécuriser les manifestations et ne seront
probablement pas disponibles pour répondre aux appels de service en cas
d'urgence. Vous vous approvisionnez en eau, nourriture, médicaments, carburant
et tout autre article que vous pourriez avoir besoin de mettre à l'abri sur
place pendant trois jours ou plus… »
Ou encore
des messages du genre : « Révisez votre plan de sécurité personnel ; réexaminez
les projets de voyage au cours de cette période, en raison du risque de
fermeture des routes ; surveillez les bulletins de nouvelles locales; évitez
les manifestations et tout grand rassemblement de personnes; partagez vos
coordonnées et vos projets de voyage avec votre famille, vos amis ou d’autres
personnes; n'essayez pas de franchir des barrages routiers; si vous rencontrez
un obstacle, faites demi-tour et rendez-vous dans un endroit sûr… »
La Banque
centrale a dû sortir un avis lundi pour exiger des institutions financières du
pays l'ouverture de leurs portes ce mardi 16 octobre. D’autres entreprises
annoncent qu’elles fermeront leurs portes à partir de midi ce mardi.
Pour plus
d’un, les manifestations des élèves des établissements scolaires publics
vendredi dernier et ce lundi sont des avant-goût de ce qui attend le pays le 17
octobre prochain. Ils étaient des centaines d’écoliers à gagner les rues de la
capitale pour exiger la construction d’écoles publiques avec l’argent de
PetroCaribe. L’image des élèves en uniforme qui parcouraient les rues de
Port-au-Prince scandant « Nous voulons l’argent du PetroCaribe » était sur tous
les réseaux sociaux et le message fort.
À l’occasion
de la commémoration de l’assassinat du père de la nation, Jean-Jacques
Dessalines, ce 17 octobre qui est un jour férié en Haïti, des partis politiques
de l’opposition, des internautes de mouvement #PetroCaribeChallenge, des
groupes organisés dans la société appellent la population à gagner les rues
pour exiger des explications sur l’utilisation du fonds PetroCaribe. Toutefois,
les partis politiques eux, en plus de la reddition des comptes, vont manifester
pour exiger le départ du président de la République.
D’autres
structures de la société comptent aussi gagner les rues pour régler leurs
comptes personnels avec le gouvernement. C’est le cas du puissant pasteur
protestant Muscadin André, responsable de la Radio, télévision et église
Shalom. Ce dernier reproche à la DGI d’avoir gelé les comptes en banque de ses
institutions exigeant le payement de plus de 3 millions de de gourdes de taxes.
Le pasteur appelle ses fidèles à manifester.
Selon des
sources proches du gouvernement, l’église Shalom n’est pourtant pas visée dans
les mesures de la DGI, mais la Radio et la Télévision Shalom qui sont
considérées comme des entreprises commerciales et qui de ce fait doivent payer
des taxes à l’État. « On est en train de faire le recouvrement des créances.
Son compte est bloqué pour non-respect des engagements envers l'État estimés à
de 3.5 millions de gourdes », affirment nos sources.
Parallèlement
à ces différents griefs et revendications, la gourde poursuit sa descente aux
enfers par rapport au dollar américain. Ce lundi, pour un dollar américain, il
vous fallait pas moins de 73 gourdes. Un taux de change record. Conséquemment,
les prix des produits de première nécessité grimpent. Une situation qui vient
s’ajouter à la liste des frustrations de la population.
Pour montrer
qu’il a le contrôle de la situation, le président de la République a entamé
depuis vendredi dernier une série de visites dans les principaux commissariats
de l’aire métropolitaine comme la Brigade d'opération et d'intervention
départementale (BOID), le commissariat de Port-au-Prince, la base du Groupe
d'intervention police nationale d'Haïti, la direction départementale de la PNH,
la base du Corps d'intervention et du maintien de l'ordre (CIMO). Cependant,
Jovenel Moïse ne s’était pas fait accompagner du directeur général de la police
nationale dans ses différentes visites.
Le Premier
ministre Jean-Henry Céant, président du Conseil supérieur de la police
nationale (CSPN), a, quant à lui, rendu visite lundi au directeur général de la
police nationale, Michel-Ange Gédéon, au quartier général de la PNH à
Pétion-Ville.
Dans un
message préenregistré publié mardi soir, le directeur général de la PNH a donné
la garantie que l'institution qu'il dirige continuera à remplir sa mission qui
est de protéger et de servir sans prendre parti. Toutefois, Michel-Ange Gédéon
a indiqué que devant la violence la police ne restera pas les bras croisés.
Des
informations laissent croire que pendant ses visites aux commissariats de
police, le chef de l’État aurait distribué de l’argent liquide aux policiers et
aux responsables des commissariats. Le secrétaire d’État à la Sécurité
publique, qui n’avait pas non plus accompagné Jovenel Moïse lors de ces
visites, porte un démenti à ces informations.
Intervenant
lundi soir à l’émission Haïti "Sa k ap kwit ?" sur Télé 20, Ronsard
St-Cyr a fait savoir que plus de 1 500 policiers sont déjà déployés un peu
partout à travers Port-au-Prince et des zones avoisinantes. Selon le secrétaire
d’État à la Sécurité publique, toutes les dispositions ont été prises pour
assurer la sécurité des vies et des biens de la population ce mercredi 17
octobre. Il a donné la garantie que contrairement aux événements des 6 et 7
juillet derniers, les forces de l’ordre sont mieux préparées à anticiper les
éventuels actes de violence.
Source: Le Nouvelliste
Auteur : Robenson Geffrad
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